Dans 6 mois, le 25 mai, le Parti Pirate a sa première ré-élection puisque le Parti Pirate Suédois défend ses deux sièges au Parlement Européen. Être ré-élu est tout à fait différent qu’être élu en tant que nouveau venu; défendre son titre signifie que vous devez montrer des résultats. Le bilan du Parti Pirate n’est pas juste suffisant pour une ré-élection; il est carrément impressionnant.
L’été 2009, le Parti Pirate Suédois a été élu au Parlement Européen avec un premier siège, puis un second, après être devenu le Parti le plus important en Suède dans la tranche “moins de 30 ans”. C’était un succès fulgurant du mouvement Parti Pirate qui a été depuis dupliqué dans plusieurs autres pays sur les 70 où le parti a été créé pour le moment.
Mais être élu sur une promesse de changement et de progrès est différent d’être ré-élu sur ce que l’on a réalisé. Alors à quoi ressemble le bilan du Parti Pirate à la fin de ce premier mandat ? A 6 mois de la prochaine élection, la campagne commence peu ou prou en ce moment, voyons pourquoi le Parti Pirate Suédois mérite sa ré-élection: regardons ce qui a été réalisé pour que l’Europe soit un endroit meilleur – et cela avec seulement 2 membres sur plus de 750 membres qui composent le Parlement Européen.
Le Parti Pirate a empêché la riposte graduée en Europe. La toute première chose qui s’est passée pendant ce mandat est la négociation finale du prétendu Paquet Télécom, pour lequel l’industrie du copyright a fait un lobbying intensif pour l’introduction de la riposte graduée en Europe – voulant déconnecter les gens de l’Internet sur la simple accusation d’enfreindre le monopole du droit d’auteur, leur refusant le plus fondamental des droits citoyens pour avoir gêné un modèle économique obsolète. Mais grâce à une combinaison de compétences, de chance, et de travail acharné, un représentant du Parti Pirate (Christian Engström) a fini dans le groupe des négociations finales du Parlement Européen, et il n’y avait pas la moindre chance que le Parti Pirate laisse le Parlement se faire écraser par des intérêts économiques dépassés. La riposte graduée a été empêchée avec succès, et rendue illégale dans tout l’Europe, grâce à l’important travail fourni par le Parti Pirate Suédois.
Le Parti Pirate a arrêté le traité de libre-échange anti-libertés ACTA. Grâce au travail acharné, discipliné et tenace, le Parti Pirate a pu enthousiasmer en interne le Parlement pour arrêter ce monstre qui était, au mieux, une législation sans-gêne sur la correspondance rédigée par l’industrie du copyright. Pendant que plusieurs groupes activistes ont travaillé dur pour parvenir à ce résultat, et le crédit revient à tous ceux qui y ont participé, le Parti Pirate était le seul à l’intérieur des portes du Parlement à donner aux membres du Parlement Européen une image précise, différente de celle dépeinte par l’industrie. Toutefois, avoir le Parti Pirate dans le Parlement Européen n’était pas suffisant pour gagner, mais avoir le Parti Pirate dans le Parlement était un élément nécessaire à la victoire – du travail minutieux d’Amelia Andersdotter à la commission Industrie, Recherche et Énergie à celui de Christian Engström à la commission Affaires juridiques. Nous avons aussi aidé la pression extérieure, en rapportant les évènements, en aidant à s’organiser et à s’enthousiasmer la résistance extérieure, en suggérant avec succès d’envoyer des fleurs après le vote aux représentants qui ont choisi de représenter le peuple plutôt que les entreprises, d’une façon sans précédent que le Parlement Européen ne pourrait ignorer. Notre combinaison de pensée en interne, de pédagogie continue, et de l’activisme extérieur a été la clé de ce travail. Et comme ACTA est mort en Europe, il est mort pour le monde entier.
Le Parti Pirate a gagné un soutien global pour une radicale mais nécessaire réforme du monopole du droit d’auteur. Qu’une proposition ait un soutien global est difficile, mais il y a aussi un des plus gros groupes politiques au Parlement Européen – le groupe des verts – qui a apporté tout son poids à la proposition du Parti Pirate pour une réforme du monopole du droit d’auteur, incluant la réduction du monopole commercial à 5 ans après la publication, l’autorisation du partage non-marchand dans tous les cas, criminalisation de toute forme de DRM, liberté d’utiliser des samples et de créer des remixs, et plus. Même si le groupe des verts n’a pas la majorité à lui seul, c’est un énorme bond en avant pour l’un de nos principaux objectifs.
En résumé, le premier mandat peut être décrit comme une série d’actions politiques brillantes et couronnées de succès, et un changement de sens du vent dans la guerre contre les libertés citoyennes menée par l’industrie obsolète du divertissement. L’offensive de l’industrie du divertissement a été arrêtée avec succès, grâce à un travail dur et obstiné. Mais l’élan doit continuer pour être en mesure d’élargir les limites des libertés des citoyens.
Voici une liste des choses dont nous savons déjà que nous aurons à gérer pendant le prochain mandat, où le Parti Pirate doit être présent:
Réforme du monopole du droit d’auteur. Nous ne savons pas quand nous y arriverons, ni à quoi la première proposition ressemblera. Mais nous savons que nous serons nécessaires pour disséquer et contrer les parties qui viennent des prétendues “parties prenantes”, c’est-à-dire les pires industries. En fait, nous sommes plutôt optimistes: avec le rajeunissement naturel du Parlement, nous serons capables de traîner l’industrie du divertissement par la peau des fesses jusqu’au 21ème siècle. Le but, bien sûr, est de légaliser complètement au moins le partage non-marchand du savoir et de la culture – quelque chose qui n’aurait jamais du avoir à attendre si longtemps. C’est quelque chose qui est maintenant dans le domaine des possibles, quelque chose qui ne l’était pas avant le premier mandat du Parti Pirate.
Les libertés des citoyens sur Internet. Le Parlement Européen a déjà commencé une série d’auditions suite aux révélations de Snowden sur le vaste abus de pouvoir des services de renseignement Américains, Britanniques et Suédois. Cela continuera bien sûr avec le prochain mandat.
Neutralité du Net. Cette bataille cruciale pour le futur d’Internet (et, pourrais-je ajouter, contre la recherche de rente d’une industrie télécom obsolète) est à peine en train de commencer, et la première étape sera énormément de travail à faire. Neutralité du net ou pas ? Cette question sera probablement résolue pendant le prochain mandat.
Un autre accord de libre-échange. Aujourd’hui, beaucoup d’attention est donnée à l’accord de partenariat Trans-Pacifique, mais un aussi traître accord nommé TTIP est en préparation – tout en secret, comme à l’accoutumée – entre les Etats-Unis et l’Union Européenne. Nous pourrions avoir besoin d’empêcher cet accord comme nous l’avons fait pour ACTA, si jamais les premiers rapports signalant du contenu totalement scandaleux se révélaient vrais.
Le Parti Pirate Suédois veut défendre ses deux sièges et en vise un troisième, sur les vingt sièges auxquels peut prétendre la Suède. C’est un but ambitieux, mais dans le domaine du réaliste. Le succès de cet objectif dépend largement de vous, vous qui lisez ce billet. Vous suivez probablement ce blog et ces articles, et beaucoup des futurs succès dépendent juste des gens qui parlent du Parti Pirate entre maintenant et dans six mois, ce qui fera que beaucoup de gens entendront le nom, encore et encore.
Parlez du Parti Pirate avec vos amis et vos collègues. Mentionnez le parti par son nom, et mentionnez le fait qu’il a besoin d’être ré-élu. La voie de l’essaimage sur des dizaines de milliers de gens qui font quelque chose de petit permet la victoire, et ça peut marcher aussi brillamment que la dernière fois. Vous pouvez en faire partie.
Traduit par Michel Amorosa